De l’importance de la préparation

(Pas seulement pour les beignets…)

Hanouka est la fête des lumières. Le mot חנוכה dérive du verbe לחנוך (lahanokh) et signifie inauguration. Dans la Bible, il désigne en général l’inauguration d’un édifice : autel, Temple, muraille etc. Dans le psaume XXX : 1, on trouve même l’expression חנוכת בית (hanoukat bayit), employéé aujourd’hui par tout un chacun pour fêter l’emménagement dans une nouvelle maison, autrement dit « pendre la crémaillère ». Sur le même mode (ou schème) sont construits d’autres substantifs verbaux exprimant l’action des verbes desquels ils sont tirés : גאולה (gueoula)du verbeגאל, חלוקה (halouka) du verbeחלק, ou פעולה  (peoula) du verbeפעל, soit l’action dans toute sa généralité.

La racine ח’נ’ך’ se conjugue sous deux formes. Elle apparaît dans deux schèmes verbaux − les fameux binyanim hébraïques. On la trouve au binyan paal dans le verset מִי הָאִישׁ אֲשֶׁר בָּנָה בַיִת חָדָשׁ וְלֹא חֲנָכוֹ  (Si quelqu’un a bâti une maison neuve et n’en a pas encore pris possession… − Deutéronome XX : 5) et également au binyan piel dans l’expression emblématique  חֲנֹךְ לַנַּעַר עַל פִּי דַרְכּוֹ (Proverbes XXII : 6). Quel rapport unit les deux verbes ? Dans les deux cas, il s’agit d’une préparation de quelque chose ou de quelqu’un, afin de remplir une certaine fonction future ou pour acquérir de bonnes habitudes. La cérémonie d’inauguration – du Temple ou du nouvel appartement − toute solennelle soit-elle,  n’est qu’une préparation à sa véritable fonction qui est de faire des sacrifices ou de vivre heureux en famille, selon qu’il s’agisse du Temple ou du foyer.

Quant au verset des Proverbes cité plus haut, on lui donne souvent le sens, très pédagogique, d’un impératif d’éduquer l’enfant en fonction de son caractère. Point de vue moderne et fort juste, certes, mais ce n’est pas là la seule explication. La suite du verset nous incite d’ailleurs à le comprendre autrement : Si on souhaite que ces bonnes habitudes qu’on veut inculquer à l’enfant, lui restent toute sa vie, il faut s’y prendre tôt, dès le début de la vie de l’enfant. Ou, en d’autres termes, l’éducation qu’on a reçue dans la tendre enfance nous marque pour la vie. Là aussi, la conception est moderne puisque la psychologie nous a appris que le caractère de l’enfant se forme jusqu’à l’âge de trois ou quatre ans. Les deux interprétations sont sans doute de mise, mais ce qui nous intéresse en l’occurrence est que les deux verbes issus de la racine חנך se rapportent à un début. A la forme piyel appartiennent les mots éducation (חינוך), לחנך (lehanekh éduquer), מחנך (mehanekh, le pédagogue) ou חינוכי (hinoukhi, éducatif), tandis que la forme paal abritera les mots חניך (hanikh : cadet, élève ou apprenti) et חונך (honekh : précepteur ou instructeur) et aussi, comme on l’a vu, le verbe לחנוך, inaugurer et son substantif qui a donné son nom à la fête des lumières.

C’est qu’il nous faut bien des lumières pour éduquer sans trop de bavures…

Ce post est tiré du livre de Fabienne Bergmann, L’hébreu parle aux Français, Editions Lichma, disponible dans les librairies françaises d’Israël, en France et sur le site https://www.lichma.fr

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