חמץ (Hametz) est le terme hébraïque pour « [pain] levé ». La Loi juive interdisant d’en posséder, d’en consommer ou d’en tirer bénéfice durant la Pâque, le mot en est venu à désigner l’antonyme de kascher au cours de la période de Pessah, et peut s’appliquer à tout produit de fermentation.
Le verbe החמיץ (hehmitz) s’applique au lait tourné ou au vin qui a aigri – et ne sont donc plus comestibles – mais aussi aux cornichons, olives ou autres aliments saumurés. Mais le terme peut aussi prendre le sens de laisser passer une occasion, une chance (parce qu’on n’a pas pu ou su la saisir), rater un avion, un rendez-vous (à cause des embouteillages ou de tout autre contretemps) ou même une émission de télé (parce qu’on avait oublié l’heure de sa diffusion).
La compagnie de quelqu’un de חמוץ (hamoutz), acariâtre, revêche, maussade, n’est pas une sinécure. Si un tel est d’humeur grincheuse, s’il « fait la tête », on dira en hébreu מחמיץ פנים (mahmitz panim) ou plus familièrement qu’il a une פרצוף חמוץ (partsouf hamoutz), littéralement : une tête aigre.
Le hametz doit donc être éliminé avant Pessah. On s’assurera la veille qu’il n’en reste plus en accomplissant scrupuleusement la בדיקת חמץ (bedikat hametz), soit l’examen méticuleux de tous les recoins de la maison pour être certain qu’elle n’en recèle plus une miette, avant de procéder le lendemain au ביעור חמץ (biour hametz), sa suppression, en le jetant au feu – שרפת חמץ (sréfat hametz).
Eliminé ce hametz, symbole de tous les manquements, de tous les ratages. Place maintenant au renouveau, au positif, à la bonne exploitation de chaque chose ! C’est justement ce qu’implique le mot מצה (matza).
La matza de Pessah, pain qui n’a pas eu le temps de lever, évoque à la fois l’esclavage et la liberté. Notons toutefois que le même mot מצה apparaît aussi dans Isaïe (58 : 4) au sens de dissension, celle-ci étant sans doute possible dans toute situation.
Le verbe מיצה (mitsa), formé à partir de la même racine, signifie pressurer, exprimer (un fruit par exemple, le citron en particulier dont on a extrait le jus – מיץ (mitz) en hébreu – et donc par extension : exploiter au maximum, tirer de quelque chose tout ce qu’on peut, épuiser (un sujet, une activité), exploiter (ses talents, les ressources que l’on a). Selon la même logique, pousser la rigueur jusqu’au bout se dit מיצה את עומק הדין (mitsa èt omek hadin).
Et si quelqu’un quitte son travail, abandonne une activité, son train-train ou son conjoint car il n’a plus rien à découvrir ou à apporter, plus rien pour le faire vibrer, on dira : הוא מיצה את עצמו (mitsa èt atsmo), soit : il a tiré de lui-même tout ce qu’il avait à tirer. L’expression n’implique toutefois ni abandon ni fin. Elle sous-entend au contraire que c’est pour repartir de plus belle. Il y a toujours quelque chose à découvrir, nous rappelle l’hébreu chaque printemps!
Ce post est tiré du livre de Fabienne Bergmann, L’hébreu parle aux Français, Editions Lichma, disponible dans les librairies françaises d’Israël, en France et sur le site https://www.lichma.fr